CHWP B.21 Catach, "Les dictionnaires de l'Académie française"

12. Conclusion: pour une informatisation des Dictionnaires de l'Académie

En conclusion, la première édition de l'Académie se situe en fait à la croisée des chemins, entre les plus anciens lexiques et les ouvrages modernes, entre la féodalité et le siècle des Lumières. La nomenclature, les conceptions et les définitions de ce corpus unique de trois siècles d'âge présentent en elles-mêmes un grand intérêt. Outre la faune et la flore, dont les approches en sont encore aux balbutiements, certains domaines paraissent dans l'Académie privilégiés: termes (aux définitions soignées) de la Cour, de la ville, des impôts et servitudes, des petites gens, et aussi mots "bas", familiers, jeux, grivoiseries, injures, etc. Les domaines les mieux représentés et qu'il faudrait sans doute étudier en priorité sont: les mots de la Cour et de l'entourage royal; les mots du Palais, de la Chancellerie; les mots d'Église et de pratique religieuse; les mots des propriétaires et des fermiers généraux; les mots du "petit peuple" de Paris et de la campagne; les mots de la vénerie, de l'équitation et de la marine; les mots que l'on qualifie aujourd'hui d'argotiques, vulgaires, etc.

Ces domaines, ainsi que les indices de la détermination des familles de mots, les choix et erreurs d'étymologie (et les réussites), les mentions de prononciation, les jugements de valeur et de registres de langue, les proverbes, les changements de sens, les changements morphologiques et graphiques, l'apparition et la transformation des féminins, les définitions de certaines catégories de référents, les archaïsmes, les mots inconnus ou disparus, etc., ne devraient pas, et pour certains ne peuvent pas être traités sans une étude préalable avant balisage. Encore n'ai-je pas abordé la nécessité, qui va de soi, d'une série de conventions graphiques et typographiques strictes à établir (je ne parle pas de normalisation ou de modernisation, car je ne les souhaite pas).

L'intérêt et le prestige de ces dictionnaires justifient, surtout pour les éditions les plus anciennes, qu'on ne se contente pas pour eux d'une saisie rapide. Ce travail devrait relever d'une équipe de spécialistes bien outillés, qui prendrait l'ensemble en compte. Je ne me cache pas la difficulté de l'entreprise. Même s'il ne faut pas rêver de reconstruire le passé du même au même, la tentative, limitée (mais réfléchie) vaut sans doute d'être tentée.

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